Flash Droit Social RH

« LE RÉCÉPISSÉ SIGNÉ DU SALARIÉ EN CAS DE NOTIFICATION DU LICENCIEMENT PAR REMISE EN MAIN PROPRE N’EST PAS UNE FORMALITÉ OBLIGATOIRE »

Dans un arrêt en date du 29 septembre 2014, n° 12-26.932, la Cour de cassation a jugé qu’un employeur pouvait valablement notifier le licenciement de son salarié par simple remise en main propre, et sans même lui demander de signer un récépissé. La preuve du licenciement peut, par exemple, être rapportée par d’autres salariés témoins de la scène. En l’espèce, une médiatrice de manifestations est licenciée pour faute grave le 1er juillet 2005, après mise à pied conservatoire. L’employeur lui reproche « le vol et la destruction de documents comptables ». La salariée soutient que le licenciement ne lui a pas été correctement notifié : L’employeur a simplement remis en main propre la lettre de licenciement sur le poste de travail, sans autre formalité. Pour la Cour de cassation, le licenciement est valide : « la preuve de la notification du licenciement pouvant être rapportée par tous moyens, la cour d’appel (…) a constaté que le témoignage de la responsable administrative de la société établissait que la lettre de licenciement avait été notifiée à la salariée par une remise en main propre et que cette dernière en avait eu connaissance ». Attention, la Doctrine remarque que « la notification du licenciement par lettre recommandée avec accusé de réception est en revanche indispensable si une transaction est par la suite envisagée. En effet, une transaction n’est valable que si elle est conclue postérieurement à un licenciement notifié dans les formes légales, c’est-à-dire par l’envoi d’une lettre recommandée avec AR » (notamment Cass. soc. 14 juin 2006, n° 04-43.123). http://www.legifrance.gouv.fr

« L’EMPLOYEUR DOIT AVOIR CONNAISSANCE DES REVENDICATIONS DES GRÉVISTES AU MOMENT DE L’ARRÊT DE TRAVAIL »

Dans un arrêt en date du 22 octobre 2014 n° 13-19.858, la Cour de cassation rappelle que l’exercice normal du droit de grève « nécessite seulement l’existence de revendications professionnelles collectives dont l’employeur doit avoir connaissance au moment de l’arrêt de travail, peu important les modalités de cette information ».
En l’espèce, trois salariés avaient adressé à leur employeur, deux jours avant de cesser le travail, une lettre de revendications professionnelles. Cette dernière a été reçue par l’employeur le jour de l’arrêt de travail. Dès le commencement de la cessation du travail, ces salariés ont informé leur supérieur hiérarchique, présent sur le lieu de travail, de ce qu’ils se mettaient en grève du fait du refus de l’employeur de satisfaire à leurs revendications professionnelles. De plus, immédiatement après la cessation du travail, des échanges téléphoniques ont eu lieu entre ces salariés et le dirigeant de la société. À la suite de cet événement, ces salariés ont été licenciés pour faute lourde, pour avoir cessé le travail une journée.
La cour d’appel a condamné la société à leur payer diverses sommes au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la grève étant valable.
Pour la Cour de cassation la Cour d’appel a légalement justifié sa décision.
Ceci est une confirmation de jurisprudence.

« ATTENTION, LE LANCEMENT D’UN NOUVEAU PRODUIT NE JUSTIFIE PAS LE RECOURS À L’INTÉRIM »

Dans un arrêt en date du 29 octobre 2014, n° 12-27.936, la Cour de cassation rappelle que son interprétation de la notion « d’accroissement temporaire de l’activité », qui permet le recours aux contrats précaires, est restrictive.
Elle veille notamment à ce que le pic d’activité ne relève pas de l’activité normale et permanente de l’entreprise, comme le lancement de nouveaux verres par un fabricant optique.
En l’espèce, un fabricant de verres optiques avait fait travailler un agent de fabrication dans le cadre de 28 missions d’intérim par l’intermédiaire de plusieurs entreprises de travail temporaire entre le 17 mai 2004 et le 30 juillet 2010.
Ce dernier a saisi la justice pour obtenir la requalification de ces différents CDD en CDI et le versement de diverses indemnités.
L’entreprise estimait que le lancement d’un nouveau produit, même relevant de l’activité normale et permanente de l’entreprise, pouvait entraîner un accroissement temporaire d’activité justifiant le recours au contrat d’intérim pendant une certaine période.
Pour la cour d’appel comme pour la Cour de cassation, au contraire, le lancement de ce nouveau type de produit constituait l’activité normale d’une entreprise de fabrication de verres d’optique :
« le lancement de ce nouveau type de produit s’intégrait dans l’activité normale d’une entreprise de fabrication de verres optiques, faisant ainsi ressortir que l’employeur n’établissait pas que le lancement en question s’accompagnait de circonstances caractérisant un accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise ».
Le salarié avait donc occupé un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

« PÉRIODE D’ESSAI OU RESPECT DU DÉLAI DE PRÉVENANCE, QUI PRIME SUR L’AUTRE ? »

Dans un arrêt en date du 5 novembre 2014 n° 13-18.114, la Cour de cassation a jugé que le respect du délai de prévenance ne devait pas aboutir à poursuivre les relations contractuelles au-delà du terme de la période d’essai.
A défaut, le salarié serait en droit de réclamer à son employeur des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En l’espèce, un directeur commercial est embauché le 17 janvier avec une période d’essai de 3 mois prenant fin le 16 avril. Par lettre du 8 avril, son employeur lui notifie que son essai n’est pas concluant mais que, pour respecter le délai de prévenance de 15 jours, son contrat de travail sera rompu le 22 avril.
Le salarié considère alors que son contrat de travail a continué postérieurement à la période d’essai et que la rupture de son contrat s’analyse donc en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Pour mémoire, en application de l’article L. 1221-25 du Code du travail, l’employeur qui décide de ne pas donner suite à la période d’essai légale doit prévenir le salarié en respectant un délai de prévenance, dont la durée augmente progressivement en fonction de la présence du salarié dans l’entreprise.
Pour la Cour de cassation, la période d’essai, renouvellement inclus, ne peut être prolongée du fait de la durée du délai de prévenance. En conséquence « en cas de rupture pendant la période d’essai, le contrat prend fin au terme du délai de prévenance s’il est exécuté et au plus tard à l’expiration de la période d’essai ».
La poursuite de la relation de travail au-delà du terme de l’essai donne donc naissance « à un nouveau contrat de travail à durée indéterminée qui ne peut être rompu à l’initiative de l’employeur que par un licenciement », selon la Haute juridiction. EN SAVOIR +

« LA CLAUSE DE DISCRÉTION N’A PAS À ÊTRE ASSORTIE D’UNE CONTREPARTIE FINANCIÈRE »

Dans un arrêt en date du 15 octobre 2014, n° 13-11.524, la Cour de cassation a jugé qu’aucune contrepartie financière n’était associée à la clause de discrétion car contrairement à la clause de non-concurrence, elle n’entrave pas le salarié dans la poursuite de son activité professionnelle. Pour mémoire, une clause de discrétion permet à un employeur de protéger ses données contre l’utilisation que pourrait en faire un salarié qui quitte l’entreprise et qui part avec un certain nombre d’informations. Cette clause s’applique même après la rupture du contrat de travail.En l’espèce, une entreprise avait fait signer à un salarié une clause de discrétion car il estimait qu’il occupait un poste sensible. Étant directeur marketing-division explosifs industriels, il détenait un certain nombre d’informations confidentielles. Licencié pour motif économique le 19 février 2009, il saisit la justice, s’estimant lésé par une telle clause qui, selon lui, produisait les mêmes effets qu’une clause de non-concurrence et l’empêchait de retrouver un emploi dans son domaine d’activité « sur lequel il y a très peu d’intervenants ». Il dénonçait aussi le caractère illimité de la clause dans le temps et dans l’espace.La Cour de cassation estime que la clause de discrétion ne portant pas atteinte au libre exercice par le salarié d’une activité professionnelle, « mais se bornait à imposer la confidentialité des informations détenues par lui et concernant la société », le salarié ne peut réclamer une contrepartie financière. EN SAVOIR+

« TRAITEMENT DU HARCÈLEMENT MORAL PAR L’EMPLOYEUR, NE PAS CONFONDRE VITESSE ET PRÉCIPITATION »

Dans un arrêt en date du 22 octobre 2014, n° 13-18.862, la Cour de cassation a précisé que l’obligation faite à l’employeur de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir ou de faire cesser des agissements de harcèlement moral n’impliquait pas, par elle-même, la rupture immédiate du contrat de travail du salarié à l’origine d’une situation susceptible de caractériser ou dégénérer en harcèlement moral.En l’espèce, il était reproché à une animatrice développement des ventes d’un laboratoire pharmaceutique un management trop agressif à l’égard des membres de son équipe. Son attitude aurait créé un climat « détestable » et une dégradation des conditions de travail. Cela s’est traduit, pour l’une des salariées de son équipe, par un arrêt de travail pour « anxiété réactionnelle liée au travail ».L’entreprise décide alors de réagir fermement : la salariée est mise à pied à titre conservatoire, puis licenciée pour faute grave.

Pourtant, la Cour estime qu’il n’y a pas harcèlement moral. La manager n’avait pas franchi la ligne rouge et avait seulement fait preuve d »autoritarisme. Et refuse même de retenir la qualification de faute grave.Elle reproche ainsi à l’entreprise d’avoir agi trop vite et trop brutalement dans cette affaire, considérant que « l’obligation faite à l’employeur de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir ou de faire cesser les agissements de harcèlement moral n’implique pas par elle-même la rupture immédiate du contrat de travail d’un salarié à l’origine d’une situation susceptible de caractériser ou dégénérer en harcèlement moral ».

« EMPLOYEUR : POURQUOI IL NE FAUT ABUSER DE L’OBLIGATION DE DISCRÉTION DU CE »

Dans un arrêt en date du 5 novembre 2014 n° 13-17.270, la Cour de cassation a jugé pour la première fois que lorsqu’une entreprise plaçait l’intégralité des documents adressés au CE sous le sceau de la confidentialité sans justifier de sa nécessité, cette atteinte illicite aux prérogatives du comité était réparée par la reprise de la procédure de consultation à son début. Pour mémoire, l’article L. 2325-5 du Code du travail dispose que « les membres du comité d’entreprise sont tenus au secret professionnel pour toutes les questions relatives aux procédés de fabrication.Les membres du comité d’entreprise et les représentants syndicaux sont tenus à une obligation de discrétion à l’égard des informations revêtant un caractère confidentiel et présentées comme telles par l’employeur ».En l’espèce, la société Sanofi Aventis R&D annonce un projet de réorganisation des métiers de la R&D et des fonctions supports. Dans le cadre de la procédure d’information-consultation du comité central d’entreprise, l’employeur adresse aux élus deux documents, entièrement classés confidentiels. Le CCE ne pouvait ainsi rien communiquer aux salariés sur le projet.Le comité saisit le juge des référés pour qu’il fasse interdiction à la société de se prévaloir des dispositions de l’article L. 2325-5 du code du travail à propos de l’intégralité des documents et ordonne la reprise à l’origine de la procédure sur la base de documents transmis sans mention de confidentialité.La Cour de cassation va dans le sens du comité et pose des règles claires. Elle rappelle que : « pour satisfaire aux conditions de l’article L. 2325-5 du code du travail, l’information donnée aux membres du comité d’entreprise doit non seulement être déclarée confidentielle par l’employeur, mais encore être de nature confidentielle, au regard des intérêts légitimes de l’entreprise, ce qu’il appartient à l’employeur d’établir ».Elle constate ensuite qu’en l’espèce, elle avait placé « l’intégralité des documents adressés au CCE sous le sceau de la confidentialité sans justifier de la nécessité d’assurer la protection de l’ensemble des données contenues dans ces documents ».En conséquence, « l’employeur avait porté une atteinte illicite aux prérogatives des membres du comité d’entreprise dans la préparation des réunions, qui ne pouvait être réparée que par la reprise de la procédure d’information et consultation à son début ». EN SAVOIR +